« Global Gâchis », le scandale mondial du gaspillage alimentaire 

30 Octobre 2012


Canal + a diffusé un documentaire choc réalisé par Olivier Lemaire et par l'anglais Tristram Stuart, rendu célèbre par ses gigantesques repas gratuits organisés un peu partout dans le monde et dernièrement à Paris. Ce documentaire a pour but de faire prendre conscience à la population mondiale que sans gaspillage, notre planète pourrait être autosuffisante.


Aujourd’hui, plus d'un milliard d'êtres humains souffrent de malnutrition dans le monde. On comprend vite que la question actuelle n'est plus de savoir comment produire plus, mais comment produire mieux : c'est-à-dire sans gaspillage et sans perte, dont souffre 1/3 de la production mondiale.

La mondialisation a favorisé un diktat du marché sur l'alimentation, et de ce fait les producteurs n'ont pas la mainmise sur leur production, ne pouvant vendre que les produits qui suivent des règles strictes. L'exemple est toujours le même : celui du calibrage des fruits et légumes. Pour pallier à cela, l'Europe a voté en 2009 une norme selon laquelle le calibrage ne devait plus entrer en compte dans la vente d'aliments. Or, cette pratique continue car les grandes entreprises ne sont pas européennes. Ainsi, la biodiversité est remise en cause face à cette course au prix le moins cher pour un meilleur coût de production.

Bien entendu, le documentaire s'attarde sur le cas de la France, où l’on sait que 90 kg d'aliments sont gaspillés tous les ans dans chaque foyer. De plus, les Français consacrent 17 % de leur budget à l'alimentation, pour en gaspiller 400 € par an.
Ensuite, Tristram Stuart continue son étude dans les hypermarchés européens. Il établit un constat très alarmant : les hypermarchés en Europe perdent 850 millions d'euros par an dans le gaspillage, ce qui équivaut à 6 fois le budget des Restos du cœur (ceux-ci servent en effet 100 millions de repas par an). Ce chiffre n'a cessé d'augmenter depuis 2001, car il est interdit aux hypermarchés d’utiliser ces aliments comme nourriture pour le bétail, du fait de la crise de la vache folle.

Tristram Stuart, coauteur de Global Gâchis (Jean-François Robert/modds)
D’autre part, dans les hypermarchés, vous trouverez toujours du pain, peu importe l’heure. Or, il faut savoir que pour faire ce pain, mille litres d'eau pour 1 kg de farine sont nécessaires. Ainsi, chaque jour, les hypermarchés gaspillent l'équivalent d'une baignoire d'eau.
Le témoignage de Benoit Hartmann de l'association France Nature Environnement révèle que les dates de péremption sur les produits secs tels que les pates ou le riz sont absurdes. On constate que ces dates sont de plus en plus courtes, de même que dans certains pays, des aliments sont retirés des rayons une semaine avant l’échéance de leur date de péremption. Il démontre par exemple que les lentilles n'ont pas de date de péremption si elles sont bien conservées. En effet, il a été découvert en Égypte des lentilles qui avait été données en offrande aux dieux et qui, lors de leur découverte, étaient toujours comestibles. Ces dates de péremptions ne sont là que pour nous faire consommer plus.

De même, qui va expliquer très simplement la mauvaise utilisation du réfrigérateur ? Scientifiquement parlant, la chaleur monte toujours : donc dans un réfrigérateur, la partie la plus chaude est celle du haut. Or, le bac à légumes se situe en bas, alors que les fruits et légumes n'ont pas besoin de beaucoup de fraîcheur pour se conserver. Certains légumes ne devraient même pas y être déposés car le froid et l'humidité altèrent leur métabolisme. Logiquement, la viande devrait être rangée en bas du réfrigérateur.

Après avoir montré le gaspillage dans un pays riche tel que la France, le documentaire nous emmène ensuite en Équateur, à Machala, pôle mondial de la banane. Ce pays pauvre compte en effet 100 mille hectares de plantation. Plus d’un Equatorien sur 7 travaille dans l’industrie de la banane. Dans ce pays, 15 % de la production est gaspillée chaque semaine. Chaque banane est contrôlée selon sa taille, son calibre, sa forme, sa couleur etc. Au total, ce sont 146 mille tonnes de bananes qui sont jetées par an, ce qui équivaut au poids de 15 Tour Eiffel.
Le problème est que les Equatoriens ne raffolent pas de la banane. De ce fait, une partie est utilisée pour nourrir le bétail. L’un des problèmes majeurs de la banane est qu’il s’agit d’un fruit qui s’oxyde très vite et donc pourrit rapidement s’il est mal conservé. À noter qu’il faut plus de 20 jours entre la date de la cueillette et l’arrivée dans nos étalages, cela impose aux producteurs de les ramasser alors qu’elles ne sont pas encore mûres.
Pour pallier à ce problème de gaspillage, le gouvernement a entrepris de distribuer gratuitement des bananes aux écoles, car il s’est rendu compte que de nombreux enfants ne mangeaient pas le matin avant de venir en cours.

Le voyage continue en Inde, un pays qui pourrait par nature être autosuffisant : mais malgré cela, 1 Indien sur 5 est mal nourri. Leur climat humide et chaud ne favorise pas la conservation des aliments végétaux. Or, les trois-quart de la population sont des végétariens.

Tristram Stuart continue son périple dans le royaume du gaspillage : les États-Unis d’Amérique. À lui-seul, le gaspillage de ce pays pourrait nourrir deux fois le milliard d’êtres humains qui ne mangent pas à leur faim.
Il est important de noter qu’en moyenne, un Américain consacre 10 % de son budget à l’alimentation mais en gaspille 600 € par an.

Stuart finit son voyage par le Japon, un pays modèle. En effet, celui-ci importe 60 % de son alimentation : de ce fait, afin de réduire les coûts, il gaspille le moins possible ces aliments. Lorsque ceux-ci sont jetés, ils deviennent soit de la nourriture pour bétail, soit du compost que les hypermarchés redonnent aux agriculteurs. Ou encore, les déchets peuvent être utilisés pour fabriquer du gaz lors de leur décomposition, ce qui permet de créer de l’énergie. Les Japonais utilisent leurs déchets à bon escient, car ils ont compris que chaque chose sur terre a une utilité pour la planète.

Le seul « gâchis » de ce documentaire est la diffusion sur Canal +, ce qui réduit son impact, pourtant d'utilité publique. Vous ne « gâcherez » pas votre temps devant ce documentaire. Sans oublier qu’en Europe, l’année 2014 sera celle de la lutte contre le gaspillage.




Rédacteur (étudiant en licence de science politique). Jeune aspirant au développement du… En savoir plus sur cet auteur